MÉMOIRE DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN : 110 ANS DE RÉSILIENCE
110 ANS APRÈS LA GRANDE RAFLE DE CONSTANTINOPLE : MÉMOIRE CHRÉTIENNE DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN
« Si un membre souffre, tous les membres souffrent avec lui » (1 Co 12,26)
Il y a 110 ans, dans la nuit du 24 avril 1915, plus de 235 intellectuels arméniens furent arrêtés à Constantinople, l’actuelle Istanbul. Parmi eux, des députés, des évêques, des médecins, des avocats, des enseignants, des poètes… C’était l’élite culturelle, religieuse et politique de la communauté arménienne ottomane. Cette rafle, conduite sur ordre du gouvernement Jeune-Turc, visait à décapiter un peuple. Ce fut l’ouverture d’un chapitre funeste de l’Histoire : le génocide des Arméniens.
Dans les semaines suivantes, la plupart de ces hommes furent déportés vers l’intérieur de l’Anatolie, notamment à Çankırı ou Ayaş, où beaucoup furent exécutés sans procès. Ce crime inaugural annonçait l’horreur à venir : 1,5 million d’Arméniens périrent entre 1915 et 1918 par les massacres, les déportations et les marches de la mort dans les déserts de Syrie.
Ce génocide, organisé méthodiquement par les autorités ottomanes, frappa non seulement les corps mais aussi l’âme d’un peuple. Églises incendiées, monastères pillés, manuscrits anciens détruits, clergé massacré… Ce fut une tentative d’éradication non seulement d’une nation, mais aussi d’une foi : celle du peuple chrétien arménien, premier peuple à avoir adopté officiellement le christianisme en 301.
Et pourtant, dans l’abîme, la lumière n’a pas faibli. Des milliers de chrétiens arméniens refusèrent d’abjurer leur foi malgré les menaces, les tortures, les humiliations. Des prêtres furent crucifiés, des familles entières massacrées après avoir prié ensemble une dernière fois. Ces martyrs ont suivi le Christ jusque dans la mort, unis à sa Passion, mais aussi à sa Résurrection.
L’Église arménienne, bien que meurtrie, ne fut pas réduite au silence. Dans les camps, dans l’exil, dans les refuges, les Arméniens continuèrent à prier, à baptiser, à célébrer la liturgie. Ils portaient dans leur cœur les montagnes d’Ararat, mais surtout la Croix du Golgotha.
Le génocide arménien fut longtemps ignoré, voire nié. Mais la mémoire chrétienne ne s’efface pas. Commémorer, ce n’est pas cultiver la haine : c’est refuser l’indifférence. C’est reconnaître dans le visage de l’Autre crucifié le visage même du Christ.
110 ans après, nous entendons encore l’écho des psaumes récités sur les chemins de déportation. Nous voyons encore les visages décharnés mais illuminés d’espérance. Et nous savons que Dieu n’abandonne jamais son peuple.
Aujourd’hui encore, l’Arménie, petit pays chrétien entouré de tensions, continue de porter cette histoire dans sa chair. Les églises se relèvent. La liturgie se chante. La jeunesse arménienne apprend à dire “Nous sommes toujours là” – « Menk chad anink » – malgré l’exil, malgré les blessures.
En tant que chrétiens, nous sommes appelés à la solidarité avec ce peuple frère. À 110 ans de distance, la mémoire devient appel : pour la paix, pour la vérité, pour la fraternité des peuples, contre toutes les formes de négation et de barbarie.
Seigneur Jésus, accueille dans ta lumière les martyrs du peuple arménien. Donne à notre monde la paix, la justice et la miséricorde. Saints martyrs arméniens, priez pour nous.










